ARLENE GOTTFRIED-L'INSOUCIANCE D'UNE EPOQUE

Arlene Gottfried – L'insouciance d'une époque

 Street photography
Arlene Gottfried, le charme irremplaçable du New York des seventies


Jusqu’au 5 mars 2016
Les Douches La Galerie
5, rue Legouvé
75010



www.lesdoucheslagalerie.com


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Du mercredi au samedi de 14h à 19h
Et sur rendez-vous
 

Décalé, tendre, libre, intime, joyeux, les qualificatifs ne manquent pas pour résumer ce portrait du New York des années 70-80. Une vie sans contrainte qui nous apparaît à des années lumière de notre quotidien. Ce vent de liberté d’expression avant l’épidémie du sida transparaît dans cette fresque noir et blanc.

Commissaires d’exposition : Laurence Cornet et Françoise Morin



C'est une exposition totalement jubilatoire que propose les Douches – la galerie avec cette sacrée photographe, inconnue à Paris ! Dactylo le jour à Manhattan, Arlene Gottfried a appris la photo à New York en cours du soir, avant de devenir professionnelle. On découvre ici sa vision en noir et blanc de la ville, dans les années 70-80, époque légère où s'affichait la liberté sexuelle avec glamour et insolence. Un regard malicieux et tendre sur les rues, les plages, les boîtes de nuit de la cité américaine.





A TRAVERS LA PRESSE




Street photography
Arlene Gottfried, le charme irremplaçable du New York des seventies

    Joséphine Bindé Publié le 07/02/2016. Mis à jour le 08/02/2016 à 10h46.



De Woodstock à Brooklyn, la photographe new-yorkaise a capté l’atmosphère libre, insouciante et déjantée de l'Amérique des années 1970.

En 1980, Arlene Gottfried se promène sur la plage nudiste de Riis Beach. En habit noir malgré la chaleur, un rabbin avance sur le sable, attirant illico les badauds. Soudain, un culturiste débarque, nu comme un ver : « Prends-nous en photo, parce que moi aussi, je suis juif ! », lance-t-il en gonflant son biceps. L’improbable cliché fait un tabac. Des histoires comme ça, l'Américaine en a des tas. Chez elle, malgré les apparences poseuses, tout est spontané et sans trucage. Fille d’ouvrière joyeuse et sans tabou, la New-yorkaise aborde ses sujets à l’instinct, d’égal à égal… et son appareil fonctionne comme un aimant.
Un périple dans un monde disparu

Amis, famille, voisins… Dès l’aube des seventies, Arlène Gottfried photographie la vie de son quartier de naissance, Brooklyn. Pour cette friande de contrastes, c’est le terrain de jeu idéal : la diversité new-yorkaise y fourmille dans toute sa splendeur, avec ce grain de folie qu’elle immortalise. Un cracheur de feu dans les toilettes d’une boîte de nuit, une octogénaire sautant à la corde en plein cagnard, un gamin déguisé en rockeur pour Halloween… En noir et blanc, ses tirages documentent une ville truffée de personnages excentriques. Sans réfléchir, elle fixe sur pellicule les scènes insolites, toujours avec un zeste d’humour. Le but ? Passer un bon moment. Et tant mieux si elle ramène une bonne image.



Sa découverte de la photo ? Encore un hasard ! Exécrant l’idée de rester enfermée dans une salle, la jeune femme refuse d’aller à la fac. Feuilletant sans conviction un catalogue universitaire, elle se laisse finalement tenter par un cours du soir pour apprentis photographes, dans un bâtiment industriel de Brooklyn. Dactylo de jour, Arlene Gottfried s’y rend sans rien connaître de cette discipline. Très vite, c’est le déclic : elle passe un diplôme de photographie au Fashion Institute of Technology.

C’est au festival de Woodstock (1969) qu’elle inaugure le nouvel appareil offert par son père. Plages, cirques, clubs mythiques, fêtes portoricaines… Elle entame un périple dans un monde aujourd’hui disparu : le New York des années soixante-dix et quatre-vingt, dont elle capte l’atmosphère libre, insouciante et déjantée. Une époque où, avant l’épidémie du sida, les jeunes fricotaient dans l’herbe au bord de la route. Et où la communauté gay, sur fond de disco, s’exhibait vêtue de satin et de plumes en agitant des sextoys géants.


Malgré tout, Arlene Gottfried peine à se faire connaître. A ses débuts, on rechigne à l’embaucher comme assistante photographe : la jeune femme n’aurait pas la carrure pour porter l’équipement. Enfin, elle trouve un job dans une agence de pub… avant de devoir repartir en freelance, remplacée par un homme. Mi-seventies, elle obtient sa première commande de photoreporter pour le New York Times. Mais sans agent ni goût pour le marketing (et ne photographiant que des inconnus, contrairement à sa contemporaine Annie Leibovitz), elle reste dans l’ombre de son frère comique Gilbert Gottfried, star du stand-up et voix du perroquet Iago dans Le Roi Lion.

Pourtant, elle aussi est un drôle d’oiseau : dans les années quatre-vingt-dix, Arlene Gottfried intègre une chorale de gospel qu’elle avait photographiée. Devenue « photographe chantante », elle n’hésite pas à faire vibrer sa voix lors de divers festivals. Et la reconnaissance fait son chemin : après avoir travaillé pour Life et The Independant, elle intègre les collections du Brooklyn Museum of Art puis de la MEP à Paris, publie plusieurs livres et remporte de nombreux prix. Aujourd’hui, c’est en couleurs qu’elle continue de mitrailler les rues de la Grosse Pomme. Même si le charme des seventies, irremplaçable, s’en est allé…









Exposition
Photographie
Arlene Gottfried - Les Douches — La Galerie

L’insouciance d’une époque

Encore 24 jours : 9 janvier → 5 mars 2016

Arlene Gottfried, dont le travail est encore mal connu en France, est avant tout new-yorkaise. Toute son œuvre s’inscrit dans ce monde urbain très spécifique, qui a constamment nourri sa soif d’observation depuis l’enfance.

L’exposition organisée aux Douches présente — pour la première fois à Paris — une sélection de photographies de jeunesse, prises dans les années 70 et 80, lorsqu’elle sillonnait sans cesse Brooklyn à la recherche de lieux vivants, de tronches étonnantes, de scènes de rue insolites.

C’est une spontanéité détachée d’ambition qui dessine son parcours. Refusant de faire des études, elle a préféré prendre un emploi de bureau pendant la journée et apprendre la photographie en cours du soir. Car cette discipline allait lui permettre de passer son temps dehors, de s’immerger sans retenue dans le flot de ses contemporains.

Hors de la ville, elle capte des scènes fortes dans le grand rassemblement de Woodstock, où elle se rend, en août 1969, comme des dizaines de milliers de jeunes de sa génération, armée d’un nouvel appareil photo que son père lui a offert. Par la suite, elle multiplie les portraits à la plage et dans les clubs. Devenue photo-reporter professionnelle, elle a continué, au cours des quarante cinq dernières années, à se régaler des scènes pittoresques de la vie new-yorkaise, à laquelle elle a consacré plusieurs livres. « Ça m’a pris une vie pour considérer mon travail comme une œuvre », observe-t-elle sobrement.

« Sometimes Overwhelming » documente le New York d’avant, quand le souffle de la disco et les prémisses du R n’ B faisait vibrer les murs du Xenon et que la communauté homosexuelle y dansait avec une théâtralité provocante qu’elle aimait prendre en photo — fourrures et maquillage dégoulinants, corps aguicheurs, costumes de plumes et de panthère, godes petits et grands, voire géants, rien n’était inapproprié si ce n’est le manque d’audace. La même insouciance régnait dans les rues, de Brooklyn à Soho en passant par Central Park et le Lower East Side.

Les extravagances de Riis Beach ou les femmes montrent et cachent leurs seins à tour de rôle, les débuts du Big Apple Circus — où elle retourne chaque année, même s’il a perdu sa simplicité des premiers temps -, les clubs de Mid-Town (avant que la 42e rue ne devienne la cacophonie visuelle et commerciale d’aujourd’hui), toutes ces images sont aujourd’hui pour Arlene comme « un vers dans un couplet de chanson ». New York, qui était alors une ville au bord de la faillite, avait beau être dure, secouée par l’insécurité, défigurée par les immeubles effondrés, « c’était une époque étrangement plus facile, dit-elle, moins troublée, et surtout moins terne ». Certaines de ces photographies précoces sont déjà iconiques, comme celle intitulée « Angel avec une femme à Brighton Beach », de 1976. Comme dans beaucoup des images d’Arlene Gottfried, du contraste assumé se dégage une harmonie ludique. Face a la quasi-nudité d’Angel, dont les bras fermement croisés font ressortir les muscles, la sexagénaire affiche une décontraction évidente, laissant poser son bras fleuri sur le dossier du banc. Ses lunettes sombres laissent deviner des yeux aussi perçants que ceux, noirs et fixés sur l’objectif, d’Angel. Leurs cheveux dessinent au-dessus de leur front une épaisse masse bouclée, crépue par l’air iodé. Ils sont poivre et sel à eux deux, antonymes improvisés comme le culturiste et l’orthodoxe d’une autre image, ou les baskets aux pieds d’une grand-mère. Leurs points communs inopinés sont autant de détails qui montrent qu’Arlene Gottfried ne juge pas ; elle se contente d’observer et de jouer avec des coïncidences visuelles.

Plus qu’un hommage nostalgique à une époque et à une ville si souvent fantasmée, cet ensemble d’images a des airs de cinéma. Un film dont les acteurs auraient été triés sur le carreau pour leur attitude inébranlable ou leur excentricité loufoque…
Laurence Cornet



Arlene Gottfried, l'insouciance d'une époque

    Art


Pour sa première exposition en France, l'artiste américaine a choisi la galerie Les Douches. Immersion dans le New York des années 1970-1980.

Il est possible de restituer toute la palette d’une époque grâce à des photos en noir et blanc. Et de faire de simples clichés argentiques des témoignages lumineux. Voilà ce que nous prouve Arlene Gottfried avec ‘L’Insouciance d’une époque’, traduit en anglais par « Sometimes Overwhelming » (« parfois accablant »). Car, si la vision de ces tirages vintage, souvenirs tendres et souvent joyeux du New York des années 1970-1980 que l'artiste a longuement arpenté, fait sourire, la nostalgie qu’elle inspire nous donne envie de dire : « C’était mieux avant. » Des regrets qui sont, bel et bien, parfois accablants.

A travers ses photographies, Arlene Gottfried nous parle en effet d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître. Un temps où Big Apple bruissait d’âmes aussi variées que colorées, créant une mosaïque sociale inédite. Où les amoureux se bécotaient allongés sur l’herbe, au bord de l’autoroute, en laissant les portières de la voiture ouvertes. Où les gens comme les communautés se mélangeaient joyeusement sur Riis Beach, à l’image de ce culturiste juif posant au côté d’un autre Juif, tout en barbe et papillotes celui-là. Choc des cultures mais aussi des générations avec ‘Angel and Woman on Boardwalk’, où une grand-mère et un jeune homme en slip de bain se font écho de leurs regards noirs, déterminés et intouchables. Des paradoxes époustouflants, également marqués par cette mamie en Sneakers et maillot de bain, posant sur les rochers telle une pin-up. Mais surtout un monde un peu déphasé et carrément décomplexé.

Ainsi, la plupart des sujets immortalisés par Arlene Gottfried regardent l’objectif fixement, paraissant s’assumer pleinement. Sur ‘Brazilian Carnaval’, un homme aux airs de Tim Curry dans ‘Rocky Horror’ et sa partenaire, genre de Joséphine Baker couplée avec une boule à facettes, nous toisent de toute leur superbe. De même que ces deux frères androgynes se baladant sur Coney Island. L’un d’eux, pantalon à pinces taille haute et cure-dent au coin des lèvres, comme une fusion de John Wayne et Grace Jones, semble même nous défier de les juger. Pourtant, certains modèles sont parfois pris dans des positions plus que naturelles, voire carrément abandonnées. L’illustration la plus probante de cette décontraction à son paroxysme ? Ce nudiste obèse reposant, bienheureux, sur un transat. Quant à la désinvolture et à folie douce de ces années, elles s’éprouvent à la longueur des shorts ou aux amusements grivois des clubbers habitués à aller s’enivrer aux Mouches. Liberté et libération sexuelle, tels étaient en effet les maîtres-mots de ce New York disparu. Qui ne se doutait pas encore que la menace du SIDA planait au-dessus de lui comme le smog.

D’ailleurs, derrière l’humour et le regard plein de tendresse qu’Arlene Gottfried pose sur ses semblables, se dissimule un aspect moins léger qu’il n’y paraît. De ce travesti aux paupières pesantes, alourdies par de gigantesques faux cils, à cet adolescent exhibant une arme à feu dans ‘Machine Gun’, la Grosse Pomme laisse parfois un goût amer dans la bouche. Les travailleurs de la nuit côtoient ceux du jour, et la photographe nous montre, sans concession, l’envers du décor et de leur intimité. Mais, qu’ils soient caustiques ou plus poignants, ses clichés sont toujours touchants. D’une émotion sobre comme cette photo de famille, dégageant plus d’amour que n’importe quel portrait officiel (le père enveloppant de son bras protecteur la mère, elle-même couvant son enfant dont seul un bout de fesse dépasse). Ou plus artistiques comme cette femme au visage à moitié mangé par l’ombre d’une feuille de palmier.

Par Clotilde Gaillard

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