SERGIO LARRAIN

LA PHOTOGRAPHIE de A à Z,  LES GRANDS PHOTOGRAPHES

Sergio Larrain, Vagabondages





SERGIO LARRAIN

« Une bonne image naît d’un état de grâce, qui se manifeste quand on est libéré des conventions, qu’on est comme l’enfant qui découvre la réalité. »,
Voilà ce que disait Sergio Larrain, décédé l'année dernière à l'âge de 81 ans, photographe mythique des enfants des rues de Santiago et de Valparaiso. Grâce à ces « Rencontres », le visiteur va enfin pouvoir découvrir l'oeuvre d'un artiste à la carrière aussi rayonnante que fulgurante, lui, le fils de la grande bourgeoisie chilienne né en 1931 qui décidera à l'âge de 40 ans de se retirer dans un coin perdu du Chili pour méditer et réfléchir sur « la foutaise de tout ça » comme il avait l'habitude de dire.

"Pour faire une bonne photo, disait-il, il faut partir de bonne humeur le matin à l'aventure, en marin qui hisse sa voile.Errer, regarder, dessiner sur un bloc.Regarder encore jusqu'à ce que l'on sorte du monde connu pour entrer dans ce que l'on n'a jamais vu.C'est alors que les images apparaissent"

Ce grand artiste chilien , entré à Magnum en 1959, convaincu que la photo était liée à l'égo et à la vanité, voulait détruire son oeuvre...(Luc Deshenoit -Télérama 3310)
(...)au moment  où la gloire lui était promise, ce fils de la grande bourgeoisie de Santiago décida d'arréter la photographie pour une retraite monastique dans le nord du Chili.(...)Il souhaitait même détruire ses péllicules.Ne plus en entendre parler, la photo , pour lui, était liée à l'égo, à l'orgueil de soi, à la vanité.Tout ce qu'il combattait .(...)

La foutaise de tout ça ? Notre monde qui ne serait que vanité ! Ses photos sont simples et traduisent avec empathie et dénuement les dérives d'un monde qui oublie les plus démunis. Ses principes photographiques ? La géométrie, le nombre d'or, la fluidité, mais surtout l'abstraction.

À travers la presse

La rétrospective du chilien Sergio Larrain dessine un monde fragile, où les corps coupés, décadrés et insaisissables se croisent dans l'urgence de la misère et de l'errance. Dans une Amérique latine où la tradition inca survit péniblement, les marginaux sont des figures perdues et vibrantes du "Satori" : ces moments de présence intense au monde. Une photographie moderne et surprenante, où chaque image, plan par plan, dans le floue et l'asymétrie, fait du hors cadre son sujet principal.
L’exposition du Chilien Sergio Larrain est un des évènements des Rencontres d’Arles. Il s’agit de la première rétrospective de l’œuvre fulgurante de cet ancien de l’agence Magnum, photographe de l’instant magique, qui a rapidement lâché son appareil photo pour se retirer dans les montagnes à méditer.
Par Valérie Oddos (avec AFP)

L’Orient-Le Jour > Culture > L’instant magique avec le photographe Sergio Larrain


CHILI PHOTOS SERGIO LARRAIN

Sergio Larrain, photographe solitaire exposé à Arles
ARTS ET SCÈNES | Ce grand artiste chilien, entré à l'agence Magnum en 1959, convaincu que la photo était liée à l'ego et à la vanité, voulait détruire son œuvre…




























L’instant magique avec le photographe Sergio Larrain
   

06/07/2013

AUX RENCONTRES D’ARLES La photographie comme un instant magique: le talent du Chilien Sergio Larrain (1931-2012), ancien photographe de l’agence Magnum devenu ermite après avoir arpenté l’Amérique du Sud et l’Europe, s’impose aux Rencontres d’Arles qui lui offrent sa première rétrospective.
Les enfants miséreux des rues de Santiago, le port de Valparaiso et ses bars glauques à en être touchants, les tristes brumes de Londres: autant d’images noir et blanc qui frappent par leur cadrage si particulier et par l’impression que le photographe est entré en résonance avec son sujet.
«Pour mon père, la photographie était un état de grâce, comme un miracle», explique à l’AFP Gregoria Larrain, présente à Arles. «Il se mettait dans un état de totale réceptivité ; à un moment, il appuyait sur le déclencheur et la magie opérait», dit-elle.


L’exposition rassemble 150 tirages sélectionnés par Agnès Sire, ancienne directrice artistique de Magnum, qui a échangé 500 lettres sur trente ans avec le photographe sans jamais le rencontrer.
Pendant des années, Larrain, retiré dans le nord du Chili où il peignait et méditait loin du monde, a refusé que ses photographies soient montrées ou publiées. Il craignait que les journalistes ne viennent l’importuner dans sa retraite comme cela avait été le cas après une exposition à Valence (Espagne) en 1999.
«Mais lorsque sa santé a commencé à décliner fin 2011, il m’a demandé si je voulais bien m’occuper de son œuvre. C’est devenu comme un devoir pour moi», poursuit Gregoria Larrain. Elle s’est mise à la tâche en collaboration avec Agnès Sire, qui dirige à présent la Fondation Henri Cartier-Bresson. Le fonds Larrain est géré par Magnum.
Fils d’un architecte chilien amateur d’art, Sergio Larrain rejette très vite son milieu catholique très aisé et mondain. Il part étudier les Eaux et forêts en Californie, s’offre un Leica.
Après un grand voyage familial en Europe, Larrain, de retour au Chili, se sent pousser des ailes de photographe.
«C’est à Valparaiso que j’ai commencé à photographier (...). Les petites filles descendant un escalier fut la première photo magique qui vint vers moi», a-t-il écrit à propos de l’image devenue mythique, Passage Bavestrello (1952).
Larrain travaille en indépendant, rêvant d’entrer un jour à l’agence Magnum. Il photographie les enfants abandonnés de Santiago. «Il se met à leur niveau, pose son appareil au sol, il est un des leurs », souligne Mme Sire.
Il saisit les regards poignants de ces garçons au visage sale, photographie leurs pieds nus recouverts de crasse.
Quelques années plus tard, en 1959, il présente cette série à Henri Cartier-Bresson, qui reconnaît «son sens de la composition et de la poésie» et l’invite à rejoindre la coopérative Magnum.
Il y réalise de nombreux reportages pendant deux ans, dont un clandestin sur la mafia sicilienne, travail qui lui laisse «des souvenirs terribles», selon Mme Sire.
Mais très vite, la photographie de presse ne l’intéresse plus. Il retourne au Chili, se marie.
«Valparaiso sera son grand œuvre. Il arpente les rues du grand port misérable et magnifique avec Pablo Neruda. Son travail, accompagné d’un texte du poète, est publié en 1966 dans un magazine suisse», rappelle Mme Sire. Des années plus tard, ayant rejoint Magnum, elle sera à l’origine de la publication du fameux essai photographique «Valparaiso», présenté à Arles en 1991.
Dans les années 1970, Larrain se met en retrait du monde, teste diverses drogues hallucinogènes, médite et fait du yoga.
Son œuvre photographique couvre une dizaine d’années seulement.
«Larrain a traversé la planète photographique telle une météorite dont il a eu la sagesse d’interrompre la course», considère Mme Sire.
Accompagnée par la publication d’une importante monographie publiée aux éditions Xavier Barral, l’exposition ira ensuite à Santiago.
Placées sous le signe du noir et blanc, les 44e  Rencontres de la photographie d’Arles proposent 50 expositions.

Profile Wednesday, June 26, 2013 | By Richard Conway @richardjconway 
Life on the Streets: Sergio Larrain at Rencontres

For a man who worked professionally for barely more than ten years, Sergio Larrain, who died in 2012, had a disproportionately large impact on photography. The author of four books, he is widely considered Chile’s finest lensman, though he became something of a recluse later in life.
Born in Santiago into a well-to-do family, he ditched a possible career in forestry for a life behind the camera, and saved up for his first Leica by working in a cafe. The son of an architect father, his love of photography grew when he later traveled the Middle East and Europe, lens in tow. His real break came in 1958, though, when he bagged a British Council bursary that allowed him photograph cities throughout the U.K.
The images that emerged – chiefly of London – were captivating shots of the everyday, and caught the eye of Henri Cartier-Bresson. The Frenchman later invited Larrian to Paris and the Chilean soon joined Cartier-Bresson’s Magnum agency as an associate in 1959 (and became a full member in 1961).

MAGNUM
Sergio Larrain
His was a career filled with disparate subject matters, tied together with his famous compassion for those he photographed. Larrain’s style is immediately recognizable: he made use of vertical frames, was a fan of low angle shots and was wholly unafraid of experimentation. Much of his work was concerned with street children, and his some of his earliest pictures – those from a 1957 series in Chile, for example – are certainly his most powerful. Though he was no stranger to architectural photography, having shot fellow countryman and diplomat Pablo Neruda’s house.
Indeed, his portraiture is as humanistic as it is environmental. One of his most captivating images, taken as part of the later Valparaiso series in the port city of Valparaiso, Chile, perfectly combines both. The piece shows two young girls going down a staircase, their delicate frames contrasting with the solid, modernist-seeming gray concrete surrounding them. It is a picture as much about its subjects as it is about the context in which see them; and with their backs turned to us, is as much about what we see as what we don’t.
“He is very different, very intense,” says Agnès Sire, director of the Henri Cartier-Bresson Foundation, and curator of an upcoming retrospective of Larrain’s work at Les Rencontres d’Arles, “for me, he is [often] interested in what you don’t see.”
Larrain stopped taking pictures professionally in the 1970s and retreated to the Chilean countryside for a life of calm meditation (though he continued to take some pieces in the 1980s, they were photographs of objects, usually in his house, which he would send to friends in the mail). It is said that he withdrew because he, ever the humanitarian, became disillusioned with the often harsh world he was photographing, and felt powerless to help.
“He stopped his career. It was not bringing him what he [thought] it would bring to him,” explains Sire. “[He felt] the fact he photographed those kids will not change the fact that there will always be kids abandoned. Photography will not help save the planet.”
Sire adds that Larrain even rejected the idea of retrospectives for most of his later life, because they might force him out of his self-imposed retreat, and that his career was meteoric for a reason: he was a man who would only, and could only, follow his instincts. “He was unique,” she says, “he was really a free man.”

LONDRES PHOTOS SERGIO LARRAIN











































































1/7/13


(Sergio Larrain / Magnum Photos)
Valparaiso , Chili, 1952, par Sergio Larrain.
Parmi elles brillent les œuvres inspirées de Sergio Larrain (1931-2012) et Jacques Henri Lartigue (1894-1986).
 « Une bonne image naît d’un état de grâce, qui se manifeste quand on est libéré des conventions, qu’on est comme l’enfant qui découvre la réalité. » Cette phrase du Chilien Sergio Larrain (1931-2012) symbolise la démarche de ce photographe mythique autant que mystique auquel les Rencontres d’Arles consacrent une exposition et un livre très attendus. Né en 1931 au Chili dans une famille de notables éclairés, Larrain fut en effet un photographe rare, à la carrière aussi lumineuse que fulgurante.
Le public doit cette rétrospective à la persévérance d’Agnès Sire, ex-éditrice de Magnum, qui sut trente années durant entretenir avec ce solitaire l’une de ces correspondances qui le reliait encore au monde extérieur via une boîte postale. « Cette connivence me permit de mieux comprendre le photographe et d’entreprendre avec les archives de Magnum un lent travail sur son œuvre. Tout en respectant son point de vue, il fallait lutter contre son désir de tout détruire… Ce n’est qu’en lui assurant qu’il donnerait beaucoup de plaisir aux autres que j’ai pu le convaincre de publier les ouvrages Valparaiso puis Londres. » 
LARRAIN TRADUIT AVEC EMPATHIE DÉNUEMENT ET DÉRIVE
Outre les images incandescentes de ces deux villes, l’on découvre son reportage sur les enfants des rues de Santiago dans les années 1950. Son appareil posé sur le trottoir pour saisir leurs pieds nus ou leurs corps lovés comme des chatons, Larrain traduit avec empathie dénuement et dérive. Publiées dans l’émouvant livret En el Siglo XX, ses images serviront à lever des fonds pour des associations caritatives.
Liberté de ton, cadrages et fragmentations poétiques s’attardant sur un visage, un geste ou un détail, Larrain saisit avec le même regard l’île de Chiloé, la Bolivie, le Pérou, Londres, Paris, la Sicile… Ses plongées au milieu des plus démunis accusent ses relations tendues avec sa famille, notamment son père dont il critique le train de vie bourgeois.
C’est cependant à cet architecte collectionneur d’art précolombien qu’il doit d’avoir forgé son regard en feuilletant les livres de Brassaï ou de Cartier-Bresson dans sa bibliothèque. Après ses études d’ingénierie forestière aux États-Unis, Larrain décide de rentrer au Chili pour devenir photographe. Il collabore avec le magazine O Cruzeiro Internacional, participe au bouillonnement artistique et intellectuel de son pays.
INTÉRÊT BIENVEILLANT POUR LES GENS SIMPLES
Dès 1952, la ville de Valparaiso qu’il ne cessera d’arpenter lui offre « les petites filles » du passage Bavestrello, synthèse de sa vision abstraite des formes et son intérêt bienveillant pour les gens simples. « J’étais dans un état de paix et de tranquillité absolues, je faisais ce qui m’intéressait vraiment et donc le résultat allait être parfait, ce fut un moment magique. » Cette initiation au long cours sur « la ville suspendue aux collines » sera publiée dans un livre en 1991 avec un texte de son ami Pablo Neruda.
En 1958, à la veille de partir à Londres avec une bourse du British Museum, Larrain rencontre René Burri qui lui confie ses films à rapporter au siège de Magnum, avec en prime une lettre d’introduction pour Cartier-Bresson qui lui propose d’intégrer l’équipe. Installé à Paris, durant deux ans il couvre la Mostra de Venise, la guerre d’Algérie, la mafia sicilienne… puis le tremblement de terre au Chili où il décide de rester. Il se mariera et aura deux enfants. En 1963, dans son livre El Rectangulo en la mano, il développe ses principes photographiques: géométrie, nombre d’or, fluidité, abstraction…
 DÉSILLUSIONS 
 « Je crois que la pression du monde journalistique – être prêt à sauter sur n’importe quelle histoire, tout le temps – détruit mon amour et ma concentration pour le travail », écrit-il en 1965 à Cartier-Bresson. Alors en pleine quête spirituelle menée à grand renfort de peyotl et de LSD, Larrain trouve la voie de la mystique orientale dans la communauté d’Arica où il vivra jusqu’en 1972, tout en continuant à faire quelques reportages. Il fait partie des photographes présents le 11 septembre 1973 lorsque le palais de la Moneda est assailli par la junte militaire.
Déçu par la presse et par la photographie, écœuré par l’avidité de la société de consommation et par la dévastation de la planète par l’homme, meurtri par la dictature, il se retire à Tulahuén avec son fils, se consacrant à la méditation, au yoga et à la peinture, fuyant définitivement le monde. « Ma rencontre avec Sergio Larrain fut à la fois lumineuse et frustrante, commente le photographe Patrick Zachmann qui filma son entrevue. Il était animé par l’obsédante idée de me convertir au yoga et au boud­dhisme. » Dissimulant son visage à la caméra, tout en parlant de la photographie comme d’une discipline spirituelle, Sergio Larrain y apparaît aussi incandescent que ses images.
Armelle Canitrot



SERGIO LARRAIN



PABLO NERUDA









en compagnie du photographe Patrick Zakman













SERGIO LARRAIN

Le Point.fr - Publié le 28/06/2013 à 15:38 - Modifié le 28/06/2013 à 18:37
Les Rencontres d'Arles 2013 sont l'occasion de la première rétrospective consacrée au travail du photographe et photojournaliste chilien mort l'an dernier.

Propos recueillis par BRIGITTE HERNANDEZ
À la une du Point.fr

Sergio Larrain s'était retiré du monde lorsque Agnès Sire, alors directrice artistique à Magnum, engagea avec lui une correspondance. Aujourd'hui à la tête de la fondation Henri Cartier-Bresson, elle raconte.
Le Point : Quelle place occupe Sergio Larrain dans l'histoire de la photographie ?
Agnès Sire : C'est une météorite. Son oeuvre purement photographique court, grosso modo, de 1953 jusqu'à 1967. Il disait : "Une bonne photographie naît d'un état de grâce, et la grâce vient quand on est libéré des conventions." Il ne s'entendait pas très bien avec sa famille, qui appartenait à la grande bourgeoisie chilienne, très cultivée. Architecte de renom, son père avait créé la collection d'art précolombien du musée de Santiago. Sa bibliothèque regorgeait de livres de Brassaï, de Cartier-Bresson, et de revues. Ainsi Sergio Larrain a-t-il eu accès très jeune à la photographie européenne et nord-américaine. En 1949, il a 18 ans et part étudier aux États-Unis : à Berkeley, en Californie, puis dans le ­Michigan, à l'université d'Ann Arbor, où il y a un labo photo. Un jour, il voit un Leica dans une vitrine. Pour pouvoir se l'acheter, il fait la plonge dans un restaurant.

SERGIO LARRAIN

Il commence jeune ?
C'est avec une association qui s'occupait d'enfants qu'il fait son premier travail construit, "Les enfants abandonnés des rues". Il les photographie comme s'il était l'un d'eux, manière évidente d'affirmer sa différence avec son milieu. Son style s'affirme dès ses débuts. Il envoie quelques tirages à Edward Steichen, le conservateur du département photographie du musée d'Art moderne de New York, et Steichen les lui achète. Se souvenant de cet épisode, Sergio raconte : "C'est comme si la Vierge Marie avait fait irruption dans ma chambre !" Dès lors, conforté dans l'idée qu'il a un certain talent, il collabore au magazine brésilien O Cruzeiro. Il réalise plusieurs reportages, dont le plus important en 1957, sur Valparaiso, pour lequel il écrit aussi le texte. Déjà à l'époque, il dit qu'il souhaite intégrer Magnum. Un jour, sur une plage du Brésil, le Suisse René Burri, membre de l'agence, s'approche de lui. Sergio l'informe qu'il part pour l'Europe le soir même - il vient d'obtenir une bourse du British Council pour photographier Londres. Burri lui demande d'apporter les films qu'il vient de faire à Henri Cartier-Bresson pour qu'ils soient traités par Magnum. "Comme ça, tu pourras le rencontrer", ajoute-t-il. Et lorsque Cartier-Bresson voit ses photos des enfants des rues, il lui ­propose de rejoindre Magnum.

Il quitte alors le Chili ?
Après Londres, il s'installe à Paris, d'où il couvre pour Magnum le mariage du chah d'Iran, la guerre d'Algérie, la mafia en Italie. Il se rend compte que les photographes font les photos que demandent les magazines, mais le commerce, ce n'est pas son truc. C'est un poète. Il retourne bientôt au Chili, où il continue à travailler sur Valparaiso, notamment avec Pablo Neruda, un ami de son père. Son travail, avec le texte de Neruda, paraît dans le ­magazine suisse Du. En 1963, il publie son premier livre, El Rectángulo en la mano, un ouvrage poétique qui tient dans la main, comme un appareil photo. Il en a conçu lui-même la mise en page et rédigé les légendes. C'est devenu un livre très recherché. Dans les années 70, Sergio Larrain se ­consacre ­essentiellement à la méditation, au yoga - qu'il enseigne -, au dessin..., dans ses montagnes, isolé, sans moyens de communication.
Quels photographes aimait-il ?
Il avait une grande affection pour Cartier-Bresson (ils ont arrêté le reportage à peu près au même moment, vers 1966). Il appréciait aussi beaucoup Josef Koudelka. Et il vouait à Bill Brandt une admiration sans bornes.
Comment l'avez-vous découvert ?
À mon arrivée à Magnum, en 1981, je voyais ces boîtes, mais jamais leur auteur. On me disait : "C'est un génie, mais un ermite." Je lui ai écrit, et j'ai eu une réponse un mois plus tard. Ce fut une très belle relation épistolaire. J'ai reçu de lui environ 500 lettres. J'ai réalisé deux livres grâce à ses conseils, Valparaiso, puis Londres. Une importante exposition a été montrée à Valencia, en Espagne, mais la pression a été trop forte et Sergio a préféré se retirer. La réussite financière ne l'a jamais intéressé. Son obsession était de sauver la planète. Mais il a continué d'envoyer des planches-contact à Magnum. Ses dernières photos étaient des satori, sortes de haïku en photographie, qu'il envoyait dans des lettres pliées en quatre.
Vous le dites plus proche de Brassaï que de Cartier-Bresson.
Il aimait photographier la matière, la pierre, les pavés, la terre. Il se mettait au ras du sol, au niveau des enfants ou des clochards qui dormaient dans la rue. Il avait une conception très personnelle de la composition : souvent, les personnages sortent du cadre. Il était persuadé que les photos étaient dans l'Univers et qu'il fallait qu'elles arrivent "dans un moment de grâce". 
Lieu de l'exposition : Église Sainte-Anne (exposition coproduite avec le musée des Beaux-Arts de Santiago du Chili et ­Magnum Photos, financée par le Conseil national de la culture et des arts du Chili). Photo ci-dessus : "Passage Bavestrello, Valparaiso, Chili 1952"


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