PAUL STRAND







 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA PHOTOGRAPHIE de A à Z,  LES GRANDS PHOTOGRAPHES

Paul STRAND
"It is one thing to photograph people. It is another to make others care about them by revealing the core of their humanness."

Paul Strand


Dites ce que vous avez à dire et faîtes que cela tienne dans un espace rectangulaire.




Paul Strand (1890-1976) est un photographe américain. Il a commencé la photographie à New York dans les années 1910. Au début des années 1920, ll a été reconnu à la fois pour ses peintures et pour ses photographies. Il a voyagé au Mexique dans les années 1920-1930. Dans les années 1960, il a photographié l’Afrique de l’Ouest et du Nord.








  1. Paul Strand: Under the Darkcloth, Part 1 of 6 - YouTube

    www.youtube.com/watch?v=dP5YTqqoAqA2 oct. 2010 - 13 min - Ajouté par ZoneIII
    A documentary about Paul Strand, one of the greatest photographers of the 20th century.
  2. Paul Strand-Manhatta(1921)-SINC(2007) - YouTube

    www.youtube.com/watch?v=NePhRIwzkfA7 août 2007 - 10 min - Ajouté par sincproject
    Paul Strand-Manhatta(1921) Music by SINC (Imaginaria2007)

PHOTOGRAPHIES : PAUL STRAND











Paul Strand

Photographe new yorkais né en 1890, Paul Strand restera dans l'histoire de l'art photographique comme celui qui a fait basculer la photographie dans l'ère moderne. Son oeuvre, déployée sur près de soixante ans, incarne à elle seule la notion d'avant-garde rapportée à la photographie.

STRAND PAUL

(1890-1976)


Très jeune, le New-yorkais Paul Strand a l’occasion de toucher à la photographie ; il est alors particulièrement attiré par le côté social du médium (les passants dans la rue pris à leur insu…), le graphisme et l’abstraction. Il étudie avec le célèbre photographe social du dix-neuvième siècle, Lewis Hine et devient, dès 1906, l’ami dAlfred Stieglitz. Ce dernier publie quelques un de ses clichés dans sa revue Camera Work (dans les numéros 48, 49 et 50). Los de la première guerre mondiale, il est engagé dans un hôpital militaire et acquiert une formation de radiologue.




Les multiples activités de Paul Strand et les thèmes très divers de son œuvre pourraient faire de lui un « touche-à-tout » de l'image photographique.


L’émergence des visages et de la nature


« Il photographie comme Cézanne fait des pommes, ou Weston des poivrons » (Jean Dieuzaide).

Paul Strand a laissé tout au long de sa légende, d'innombrables clichés. Ce qui nous frappe en regardant une photo de Paul Strand et donne sa signature, c’est l’intensité qui en émane. Il était partisan absolu de la Straight photography, la photographie pure et directe, sans apprêt, rude, non idéalisée.
L’objectivité est la pure essence de la photographie, c’est sa plus grande contribution et en même temps sa limite. (Paul Strand).


Celle qui vous fait face frontalement, avec toute sa puissance. Que ce soit dans ses portraits les plus directs, ou dans la patiente mise en valeur des objets les plus quotidiens, Paul Strand est tension, vision directe. Rien n’est banal, pas plus une pierre qu’un visage. Tous les deux recèlent une part profonde d’invisible et d’intériorité. Il inscrivait ses modèles dans une construction rigoureuse, architecturale, géométrique à ses débuts. Mais ce sont les gens qui le fascinaient. Pendant longtemps, Strand a fait «des portraits de gens tels que vous les voyez dans les parcs de New York et ailleurs, assis simplement, sans être conscients d'être photographiés. ... J'ai senti que l'on pouvait obtenir une qualité d'être à travers le fait que la personne ne savait pas qu'elle était photographiée ... Et je voulais saisir ces personnes dans un environnement dont ils avaient eux-mêmes choisi d'être parie prenante ». Il ira dans les bidonvilles, les parcs. Sa devise était claire et évidente :

Dites ce que vous avez à dire et faites que cela tienne dans un espace rectangulaire.(Paul Strand).

















À la fin des années 1940, Paul Strand a parlé de créer « une série des photographies qui seront concentrées sur l’histoire, l’architecture, des environs et la population d’une petite ville qui révélerait ‘ le dénominateur commun de toute l’humanité ‘ et serait un pont vers une compréhension plus profonde entre les pays. » Ce livre présente une sélection rigoureusement éditée de ces photographies faites en France, l’Italie et la Nouvelle Angleterre entre les années 1943 et 1953.
Strand a identifié et a exploré les variations innombrables de quelques thèmes centraux : le rapport entre les gens et le monde naturel, la beauté d’objets simples et des structures ainsi que la dignité inhérente à chaque individu indépendamment de richesses ou d’un statut social. Les photographies de Strand encouragent le lecteur à regarder étroitement et observer comment les détails et les relations formelles apparaissent.















Paul Strand aura été un homme irréductible, indigné, et toujours refusant les compromis, quitte à s’exiler, à se terrer. Il est né le 16 octobre 1890 à New York de parents originaires de la Bohème qu'ils vaient quitté comme de nombreux juifs. Petit gamin juif au milieu d’un monde en devenir, il va grandir émerveillé par la verticalité des villes. En 1907 il reçoit son premier appareil photo.Il fut élève du célèbre photographe social Lewis Hine qui lui apprendra l’éthique de la vérité du réel. Il va découvrir la célèbre galerie d’Alfred Stieglitz, la galerie d'art 291, dite Photo-Secession Gallery, où commençaient à naître l’art photographique et l’avant-garde moderniste. Il va décider que la photographie ne sera plus un passe-temps, mais sa vie. Il reçoit le choc du mouvement cubiste (Pablo Picasso, Georges Braque ou Constantin Brancusi) qui va influencer ses photos comme le fauvisme également.

Stieglitz va promouvoir le travail de Strand aussi bien dans sa galerie, que dans sa revue Camera publication.

C’est l’époque à la fois des abstractions formelles et des photographies sociales. Il était à la croisée des chemins.
 « Trois routes importantes s’ouvraient à moi. Elles m’aidèrent à trouver mon chemin. Mon travail se développa en réponse à 1) mon désir de comprendre l’évolution nouvelle de la peinture, 2) mon désir de pouvoir exprimer certains des sentiments suscités en moi par New York, ville où je vivais, 3) un dernier désir, aussi important que les deux précédents qui était que je voulais voir si je pouvais photographier les gens dans la rue sans qu’ils se rendent compte de la présence de l’appareil photo. » » (P. Strand, 1971).

Paul Strand croyait à l'utilisation de la caméra comme un outil de réforme sociale. Il sera toute sa vie un homme de gauche, très proche du parti communiste. À la fin de la Première Guerre mondiale, que Paul Strand effectuera dans un hôpital militaire, il y acquiert une formation de radiologue. Ce qui n’est pas innocent pour sa vision future de la réalité.
Paul Strand impose sa révolution de la perception de l’objet et du champ de la photographie domine toute la photographie.

Paul Strand va délaisser la peinture pour le cinéma naissant, en quittant un peu la photographie. New York la Magnifique sera son premier grand projet cinématographique, et il y montre la vie quotidienne de la ville, mais avant tout de ses habitants. D’autres films muets suivront, dont La Vague en 1934 sur des pêcheurs mexicains. Il filme aussi le sport, l’art lyrique, le documentaire comme The Plow that Broke the Plains, (La charrue qui détruit les plaines) (1935). Une commande du gouvernement mexicain en 1936 et du syndicat antifasciste donnera Native Land sorti en 1942. Il va ardemment militer à des films qualifiés de subversifs au sein de Frontier qu’il fonde. Le cinéma d’avant-garde expérimental à visée sociale sera sa machine à faire reculer les fascistes. Il rencontre Eisenstein lors de son voyage en URSS en 1935, et ne voit rien, ou ne veut rien voir, des crimes staliniens en cours.

Le procureur général, Attorney General, le qualifiera de « non-américain ». La Deuxième Guerre mondiale laisse un répit à Paul Strand engagé dans le combat général et patriotique contre le fascisme. Il va avoir droit à une grande rétrospective au MoMA en 1945. Il poursuit son utopie de réaliser « une série des photographies qui seront concentrées sur l’histoire, l’architecture, l'environnement et la vie de la population d’une petite ville, et qui révéleraient le dénominateur commun à toute l’humanité et seraient un pont vers une compréhension plus profonde entre les pays.».















Paul Strand ne veut pas faire de la ressemblance, mais il ne veut pas qu’elle soit perdue. Il s’interdisait tout trucage, toute retouche, toute manipulation. Mais l’amour de la forme venait toujours renforcer le fonds. Honnêtement, artistiquement. Ses photos demeurent, certes documentaires, mais encore plus approfondissement, interrogations. Sa devise était simple, elle aussi : Le regard doit se poser partout, sans vouloir charmer, sans dénaturer.
Paul Strand a fait école, et sur le tableau noir de ses photos nous continuons à apprendre.



















« Nous touchons là au caractère essentiel de la photographie «art de la vie : elle est la trace fixée d’une réalité donc toujours ouverte à une réalité », et par ce fait, chez Paul Strand, synonyme d’hommage à la vie. (Jean Dieuzaide).

Cette note de Jean Dieuzaide à l’ouverture de la saison 81-82 de la galerie du Château d’eau, situe l’importance du photographe américain Paul Strand dont la force créatrice a laissé des empreintes profondes sur ses contemporains, mais aussi sur les plus jeunes générations.
En effet bien que déjà classique dans l’histoire de la photographie en tant qu’art à part entière, Paul Strand continue d’irradier par sa perfection formelle, ses recherches, sa façon de rendre vivants et vibrants les détails, de magnifier et la terre et la vie. Il est un maître incontesté. N’oublions pas que Walker Evans a voulu devenir photographe en découvrant le portrait de la femme aveugle dans les années 1920.
Il s’agissait à cette époque de vouloir défendre une éthique plus qu’un outil technologique, même séduisant.
Toute la vie et la carrière de Paul Strand témoignent de la profondeur de ses convictions en tant qu’artiste et en tant qu’homme, qui l’amèneront à s’exiler en France pour fuir le maccarthysme.

Il était autant attiré par la restitution fantasmée de la nature immense, que par les portraits des hommes simples, aussi vastes pour lui que les paysages. « La vie des choses simples » était sa recherche, son aboutissement.
Mais même dans ses portraits les plus dépouillés, les plus rudes, il ne pouvait s’empêcher de faire de l’art, et donc de réintroduire de l’esthétisme. Il voulait magnifier la vie. Cela sera sa signature. Son maître et ami Alfred Stieglitz disait à peu près cela : «Les gens simples que Paul Strand photographie, le sont simplement, avec leur environnement, leurs regards frontaux. Mais Paul Strand, tout en voulant laisser en eux exister ce qui est, va en eux et les transforme en symboles ».




















Mais il ne peut être réduit à l’apôtre de Nouvelle Objectivité, car la nature «objective du réel », est explorée par lui jusqu’à la transparence des vibrations intérieures, mais il s’y refuse pourtant en théorie :
« J’ai des moyens esthétiques à ma disposition, dont j’ai besoin pour pouvoir dire ce que je veux dire à propos des choses que je vois. Et la chose que je vois se trouve à l’extérieur de moi – toujours. Je ne cherche pas à décrire un état intérieur. ». Pourtant il se contredit souvent, heureusement pour nous. Certes le choc de ses clichés est frontal, sans intermédiaire, sans intercession, mais parfois on peut percevoir au-delà une vie. Il voulait contrôler la réalité, elle s’est défendue.

Paul Strand était aussi un cinéaste et un peintre. Pendant ses soixante ans de travail artistique, il aura abordé beaucoup de thèmes, même si on ne semble retenir de lui que le créateur avec Alfred Stieglitz et Edward Weston du courant moderniste. Certes il a fait basculer la photographie dans l’ère moderne et fait tomber dans les oubliettes le mouvement pictorialiste et de son esthétique picturale qui faisait alors autorité. Il est un ennemi acharné d’Edward Steichen et de Clarence White, dont il ne supporte pas la subjectivité et leur amour de la beauté brumeuse.
Il a pourtant parcouru les Amériques, surtout le Mexique et ses statues de saints plus proches de la magie que de la foi, l’Afrique et l’Europe.

S’il est considéré comme incarnant à lui seul la modernité, ce qui est abusif, il demeure un « homme nouveau », croyant au pouvoir de l’image, à une nouvelle perception des choses par le médium de la photo. Il a voulu traiter la condition humaine prise dans le contexte urbain moderne, et jamais il ne dérogera à son exigence.

« La photographie a été la vie de Paul Strand. C’est l’instrument grâce auquel il a pénétré les replis de la nature des hommes, c’est l’outil au moyen duquel il a transmis au monde ce que l’œil le plus perceptif a vu, ce que la sensibilité la plus ardente a ressenti, ce que la compréhension la plus lucide a hurlé. C’est le langage dans lequel il a écrit le plus moderne des hymnes à la force et à la dignité des hommes, à la sourde violence et à la beauté de la nature » (Léo Hurwitz, préface du Mexican Porfolio, 1940, cité dans la monographie du Château d’eau de 1981).


Gil Pressnitzer

Puis le climat de la guerre froide et le maccarthysme triomphant vont l’éloigner de son pays. En juin 1949 Strand quitte les États-Unis pour présenter son film Native Land au Festival international du Film à Marianske Lazne, en Tchécoslovaquie. Il ne reviendra presque jamais. De plus il exige que ses livres soient publiés en Allemagne de l’Est. Dans le début des années 1950, il s'installe en Europe qui se relève à peine de la guerre, passant six semaines dans le nord de la communauté agraire italienne de Luzzara.
Puis il s’installe en France, à Orgeval avec sa troisième épouse Hazel Kingsbury Strand qui sera son assistante autant que sa compagne. Pendant 27 ans il va paisiblement vivre dans sa campagne, rencontrant des artistes comme Braque, dont il se sentait très proche, ou d’autres, son grand ami Claude Roy, et s’adonnant aux natures mortes et aux gros plans de fleurs, et à de nombreux voyages en Europe, tous surveillés de près par le FBI.
Jamais il ne parlera le français, il ne parlait que la photo.

Il est décédé calmement dans sa maison d’Orgeval, au milieu de ses fleurs, le 31 mars 1976.

STRAND PAUL
(1890-1976)
Les multiples activités de Paul Strand et les thèmes très divers de son œuvre pourraient faire de lui un « touche-à-tout » de l'image photographique.
Né à New York en 1890, il s'adonne à la photographie dès son adolescence. Étudiant sous la férule de Lewis Hine, le grand photographe social du début du siècle, il est également l'ami d'Alfred Stieglitz, photographe, éditeur de la revue Camera Work et responsable de la galerie « 291 » qui expose dès l'avant-guerre Braque, Picasso, Brancusi ainsi que de jeunes photographes. Stieglitz publiera dans Camera Work des photographies de Strand, en particulier dans le dernier numéro de la revue paru en juin 1917. Les recherches qu'effectuera Strand durant sa jeunesse seront marquées par cette double influence : puissance du message social (vie de la rue, passants qu'il portraiture à leur insu) et fascination pour l'abstraction et le graphisme (architecture, études de machines et d'objets). Son expérience de technicien de radiographie, acquise sous les drapeaux pendant la Première Guerre mondiale, ajoute encore à sa passion pour toutes les applications de la photographie. S'ouvre ensuite pour Strand une longue parenthèse cinématographique dans le documentaire lyrique, le reportage de sport, la fiction sociale pour des instances gouvernementales : Manhatta (1921), The Plow that Broke the Plains (1935), Native Land (1942). Le cinéma est pour Strand une passion autant qu'une source de revenus. Il n'abandonne cependant pas la photographie avec laquelle il poursuit des recherches sur le paysage, la représentation végétale, le portrait. Après la guerre, la notoriété venue, Strand commence une longue série de voyages marqués à chaque fois par la publication d'un livre ou d'un portfolio : Tchécoslovaquie, France (1950), Italie (1952), Nouvelles-Hébrides (1954), Égypte (1959), Roumanie (1960), Ghana (1963), jusqu'à ce que l'âge et la maladie le contraignent à ralentir son activité. Ainsi, photographe passionné par le mouvement, cinéaste social


Exposition photo
Photographies de Paul Strand à Giverny

Un des plus grands photographes américains du XXe siècle, Paul Strand (1890-1976) poursuit tout au long des soixante années de sa carrière une esthétique moderniste et participe ainsi à l’histoire de la photographie moderne. « Photographies de Paul Strand : trois chemins parcourus » dresse un portrait de l’œuvre du photographe, en l’analysant à travers trois voies de lecture. L’exposition rassemble soixante-quinze tirages originaux provenant de la prestigieuse collection du J. Paul Getty Museum de Los Angeles en Californie.

Né à New York, Strand s’inscrit à la Ethical Culture School, une école moderne qui encourage ses étudiants à devenir des citoyens engagés, en les immergeant dans un environnement favorable au développement de leur créativité et de leur liberté de pensée. Son premier enseignement de photographie lui est prodigué par Lewis Hine, reconnu pour ses reportages sur les conditions de travail des ouvriers américains. En 1907, Hine organise une visite d’étude à la galerie d’avant-garde 291 d’Alfred Stieglitz, qui marque durablement le jeune homme. Cette rencontre est le point de départ d’une amitié durable entre les deux photographes. Dans un article de 1916, Stieglitz écrit : « Strand est un jeune homme que je suis depuis de nombreuses années [...]. Sans nul doute le photographe le plus important que ce pays ait connu depuis [Alvin Langdon] Coburn [...]. Il a apporté une vision nouvelle de la photographie. »
Photographie, New York, 1917
The J. Paul Getty Museum, Los Angeles

Premier chemin : les principes de l’art moderne
D’abord attiré par le Pictorialisme, Strand adopte une esthétique puriste, presque abstraite dans ses très belles natures mortes. Il est sans aucun doute marqué par les œuvres de Cézanne, Picasso et Braque ainsi que par d’autres artistes d’avant-garde qu’il peut admirer dans la galerie d’Alfred Steiglitz ou pendant la célèbre exposition moderniste, l’Armory Show de 1913. Très tôt, Stieglitz reconnaît dans le travail de Strand, comme Photographie de 1916, une vraie percée stylistique, et offre au jeune photographe sa première exposition individuelle dans sa galerie, dès 1916, tout en publiant ses photographies dans son magazine, Camera Work. De 1925 à 1928, Strand se rend à plusieurs reprises à Georgetown Island, dans le Maine, pour faire des photographies et rendre visite à son ami, le sculpteur Gaston Lachaise. Fasciné par les productions de la nature, Strand photographie les formes organiques avec la même rigueur et la même pureté que ses natures mortes ou ses sujets industriels.
Deuxième chemin : un esprit du lieu
L’exploration par Strand du monde qui l’entoure s’accompagne toujours d’une attention soutenue aux formes et à la lumière. Afin de capter le dynamisme de la métropole moderne, Strand n’hésite pas à adopter des perspectives inhabituelles ou des formats allongés, comme dans les belles compositions de City Hall Park, New York (1915) et New York (1916). En 1920, Strand réalise avec le peintre et photographe précisionniste Charles Sheeler un célèbre court métrage sur la ville de New York, Manhatta, qui associe sur un rythme syncopé, des images abstraites des gratte-ciels. Durant toute sa vie, Strand ne cesse également de voyager, au Mexique, en France, en Italie, et en Écosse. Dans chacun de ces lieux, ses photographies parviennent à dégager un esprit du lieu.
New York, 1916
The J. Paul Getty Musuem, Los Angeles

Troisième chemin : une conscience sociale
Strand utilise un appareil photo avec un prisme qui lui permet de réaliser des portraits sans être vu de ses modèles. Si ses portraits ne révèlent pas l’identité de leur sujet l’enregistrement minutieux des visages permet de distinguer l’individu des foules. La femme non-voyante de Photographie, New York (1917) est un exemple de la manière dont Strand oblige le spectateur à se confronter à des personnes qu’il voudrait ignorer. Sa passion du portrait l’accompagne lors de ses voyages, donnant lieu à une fascinante galerie de portraits, photographiés tout autour du monde.
La Cousette à Luzzara, 1953
The J. Paul Getty Museum, Los Angeles © Aperture Foundation

En 1950 Strand quitte définitivement les États-Unis, fuyant le climat politique de la guerre froide et le maccarthysme et s’installe en France où il poursuit son travail jusqu’à sa mort le 31 mars 1976.
Les commissaires de l’exposition sont Weston Naef, Anne Lyden et Anne Lacoste, et à Giverny, Bronwyn Griffith.
Un petit journal accompagne cette exposition (version française et anglaise). Prix public : 1,50 €.
Le film Manhatta de Paul Strand et Charles Sheeler sera diffusé quotidiennement dans l’auditorium.
Source : Musée d’art américain Giverny

Bibliographie


Publications en français

Paul Strand de Claude Roy –Photo poche-Actes Sud-2011
Le Monde à ma porte, La Martinière, 1994.
La France de Profil, Claude Roy ; Ed. Clairefontaine (1952)
Ghana: un portrait d'Afrique, Le Chêne (juin 1984)
Nouvelle-Angleterre (1950,)
Vivre l'Égypte (1969)
Les Hébrides, pays de l'herbe sous le vent. Ed. Clairefontaine (1962).
Un Paese (photos de Luzzara, vallée du Po, Italie) (1955)
Monographie du Château d'eau, Paul Strand, 1981


Paul Strand est mort en 1976, non loin de Giverny, à Orgeval. Il était établit en Europe depuis 1950. Le musée d’art américain lui consacre une exposition prêtée par le Getty Museum de Los Angeles, où elle s’est tenue de mai à septembre 2005, offrant au regard du public 75 des 186 tirages vintages de l’artiste conservés par le Getty. Ces tirages par leur densité, leurs nuances dans les contrastes, souvent violents, leurs très petits formats renfermant de vastes horizons orageux, procurent un réel plaisir. L’axe voulu par les conservateurs californiens est ici strictement repris et s’articule autour de trois chemins, tels que Paul Strand les définis en évoquant ses premiers pas dans la photographie. Il s’agissait pour lui alors, au début des années 1910, de répondre par la photographie à la peinture, de rendre les sensations provoquées par une métropole telle que New York, ainsi que de s’intéresser à l’humain. Cette profession de foi de jeunesse donne ainsi le fil d’une exposition dont les derniers tirages datent de 1954. 








La très célèbre photographie de Strand, « Wall Street » (1915) n’est pas présente dans l’exposition (si ce n’est en vitrine entre les pages d’un numéro de Camerawork). Toutefois, on peut y observer deux photographies prises depuis son arrière-cour à New York où un semblable jeu sur la géométrie de la ville, ses droites qui se coupent, ses obliques et son désordre, se joue. Strand devient à ce moment l’incarnation de l’assimilation de l’avant-garde européenne aux Etats-Unis, par la volonté de Stieglitz, qu’il rencontre dès 1912. Ce dernier expose surtout des peintres dans sa galerie, la 291, et introduit Cézanne, Matisse et le cubisme dans son pays. En 1913 a également lieu l’Armory Show, lors duquel le ready-made de Duchamp concourt à avancer outre-atlantique l’idée d’une désacralisation du « faire » dans la représentation. Dès 1916 Stieglitz accroche les photographies de Strand, qu’il comprend comme la sortie du pictorialisme, caduque dans le contexte de cette modernité qu’il recherche et qu’il prône. 





Paul Strand développe dès lors une approche très formelle autour de la lumière, des formes et des personnes, figure humaine qu’il approche en un premier temps « masqué », en se servant d’un objectif dissimulé qu’il pointe sur ses sujets. Représentative de ses préoccupations de construction par la lumière et les contrastes, « Fence » (1916) se compose comme les paysages qu’il fera au Nouveau-Mexique et au Mexique à partir de 1930. A ce moment, il participe d’un développement de la photographie à proprement parler à l’échelle nord-américaine. Cette modernité que les Européens célèbrent dans la glorification du progrès, de la ville, de la machine, sentiment quasi inné aux Etats-Unis, Paul Strand et ses contemporains la cherchent dans l’objectivité, une certaine droiture vis-à-vis du médium et sa technique, qu’ils qualifient de « straight ». Cette période-ci est abordée dans l’exposition avec des photographies prisent à Taos au Nouveau-Mexique, notamment celle figurant l’église du village. L’église de San Francisco est faite en terre, un contrefort massif et doux soutien ses murs trapus, la blancheur de ses murs irréguliers éclatent dans un ciel parcourus de nuages. Plus de cinquante fois Strand revient sur le motif, mais avec lui également au même endroit, et plus tard au Mexique Ansel Adams, Laura Gilpin, van Dyke ou Alvarez Bravo. Cette tendance « formaliste » qui se poursuit, notamment autour de photographes tels que Edward Weston ou Minor White, reste l’ancrage temporel dans lequel Paul Strand est principalement évalué. En définissant à ce moment une échelle et des espaces spécifiquement américains, il fait partie des artistes qui permettent à la modernité de pénétrer les Etats-Unis. 

Photographie, New-York 1917 - The J.Paul Getty Museum Los Angeles  

Parallèlement depuis les années 1920, il s’intéresse au film, devient un opérateur recherché, tourne « Manhatta » en 1921 et fonde Frontier Films. Il se rend en URSS et rencontre Eisenstein en 1935. Il s’intéresse aux hommes, politiquement et photographiquement. La dernière partie de l’exposition du Getty, dévoile ses photographies de communautés de villageois en Europe qu’il conçoit après-guerre comme autant de livres de photographies, dans lesquels les textes, notamment de l’écrivain Claude Roy, sont d’importance. Il se révèle presque documentaire face à la figure, avec laquelle il maintient une distance respectueuse. « La France de profil » (1952) ou « Un Paese » (1955) nous montre des familles au seuil de leurs portes, de grands gaillards et la mama posant dans l’embrasure de leurs décors humbles. C’est pour des raisons politiques que Paul Strand a quitté les Etats-Unis, lorsque le maccarthysme le contraint à s’exiler. Se faisant, il est confronté à l’étranger, à l’Autre, et ses convictions humanistes peuvent continuer de s’exprimer dans sa photographie. L’Europe qu’il rejoint se relève de la guerre, l’osmose entre l’homme et son milieu qu’il voudrait photographier, ce village idéal qu’il cherche et croit trouver en Italie, il semble finalement le croiser en tous lieux sur le vieux continent. Avec ses photographies de Tir a’Mhurain, réalisées en Ecosse en 1934, l’exposition se clôt sur un petit village de pêcheurs, inscrits dans le paysage tourmenté de leurs îles, la mer roulant sous des cieux chargés. Lorsque Paul Strand quitte les Etats-Unis en 1949, la Photo League va être dissoute sous la pression politique en 1951. Créée dans la mouvance culturelle de l’International Arbeiter Hilfe (Fonds de soutien International aux Travailleurs), elle regroupe cinéastes et photographes, notamment Lewis Hine, M. Bourke-White et Berenice Abbot. Nancy Newman, conservateur de la photographie au Moma, et son époux Beaumont Newman cherchent après-guerre des investisseurs privés pour donner à la Photo League une dimension institutionnelle, efforts qu’ils verront contrecarrés et boycottés. C’est dans ce climat que Paul Strand effectue la série « Time in New England » en 1945, avec des textes de Nancy Newhall, série au travers de laquelle il entrevoit une Amérique qui serait l’inverse de celle politiquement suffocante qu’il subit. Sur la côte Est, dans la région où s’établirent les pionniers, il photographie maisons de bois et clochers d’églises battues par les vents, dunes et embruns, y cherchant une liberté et une pureté originellement américaines. Hélène Lagrange 






Paul Strand (1890-1916)




Blind roman, New York





1916




Photogravure, Camera Work, n° XLIX-L, juin 1917




22,5 x 16,5 cm




Don de l'artiste 340381
Bibliothèque nationale de France, Rés. Ad-1940-8 
© The Paul Strand Archive/1971 - Aperture Foundation Inc.





Cette photographie pose la question de la médiation. Elle a été présentée pour la première fois dans le numéro spécial (XLIX-L, juin 1917) de la revue d’Alfred Stieglitz, Camera Work, livraison consacrée à Paul Strand, partisan radical de la Straight photography. Le portfolio mêle portraits directs et photographies d’objets quotidiens. Cette volonté de rapprocher les objets banals et le portrait signe la volonté d’en finir avec la tendance abusive à l'idéalisation. Blind woman n’est pas une photographie dérobée, sa construction rigoureuse le démontre. Tout s’organise autour d’un œil fixé non sur le regardeur, l'objectif, mais tourné vers l’arrière, planté dans le mur qui barre le fond. Tautologique, l'image se referme sur elle-même, inscrit dans la composition le texte de la légende, le numéro d'identité du modèle. Paul Strand subvertit une pratique habituelle du portrait classique, où identité référentielle et identité picturale se faisaient écho. Blind : il s’agit d’un constat et d’une question. Celui de la représentation du visage, impuissant à se voir lui-même autrement que dans une médiation. Celle du statut du spectateur qui voit et ne peut être vu.













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